Hypervigilance et corps flottants : quand le cerveau amplifie ce que l’on ne devrait pas voir

Aurore Allemand • 27 février 2025

Vous avez l’impression que vos corps flottants deviennent de plus en plus gênants ? Qu’ils prennent toute la place dans votre champ de vision, au point de vous obséder ? Ce phénomène n’est pas qu’une illusion : c’est le résultat d’un mécanisme bien connu du cerveau, appelé hypervigilance.


Vous avez l’impression que vos corps flottants deviennent de plus en plus gênants

L’hypervigilance : un filtre déformant du cerveau


L’hypervigilance est un état où le cerveau scrute en permanence son environnement, prêt à détecter la moindre anomalie. C’est une réponse normale au stress ou à un danger, mais quand ce mécanisme s’emballe, il peut amplifier des sensations anodines jusqu’à les rendre envahissantes.


  • Un bruit répétitif qu’on ne remarquait pas devient insupportable.
  • Une douleur légère semble s’intensifier à force d’y penser.
  • Une imperfection visuelle, comme un corps flottant, devient obsédante.


Ce processus est bien connu chez les personnes souffrant d’acouphènes : plus elles se concentrent sur le sifflement dans leurs oreilles, plus il devient insupportable. Il en va de même pour les myodésopsies.


L’hypervigilance peut être définie selon deux perspectives complémentaires : anthropologique et physiologique.


D’un point de vue anthropologique, c’est un mécanisme de survie hérité de l’évolution. Nos ancêtres devaient être en alerte permanente pour détecter le moindre danger – un prédateur, un bruit suspect, un changement d’environnement menaçant. Cette capacité à scanner l’environnement et à réagir rapidement était un atout dans des contextes où la vigilance déterminait la survie. Aujourd’hui, ce même réflexe est toujours actif, mais il se manifeste dans des situations modernes, souvent sans réel danger, comme la focalisation excessive sur une sensation visuelle.


Sur le plan physiologique, l’hypervigilance est liée à l’activation excessive du système nerveux autonome, en particulier du système sympathique, qui déclenche la réponse de stress. Cette activation entraîne une augmentation du cortisol et de l’adrénaline, des hormones qui rendent les sens plus aiguisés et intensifient la perception des stimuli. Chez une personne hypervigilante, le cerveau réduit sa capacité à filtrer les informations non essentielles, ce qui amplifie des sensations normalement secondaires, comme les corps flottants. Ce dysfonctionnement du filtrage sensoriel explique pourquoi certaines personnes perçoivent leurs myodésopsies de façon obsessionnelle, alors que d’autres n’y prêtent presque aucune attention.



Pourquoi l’hypervigilance rend les corps flottants plus présents ?


En temps normal, le cerveau est conçu pour ignorer certains stimuli constants, comme les vaisseaux sanguins de la rétine, qui sont toujours présents dans le champ de vision mais totalement invisibles. Il filtre ces informations pour ne garder que ce qui est essentiel.


Mais lorsqu’on devient hypervigilant, ce mécanisme de filtrage se dérègle :


  1. On commence à “chasser” les corps flottants. Chaque mouvement oculaire devient un test pour voir s’ils sont toujours là.
  2. Le cerveau les interprète comme une menace et les place en priorité dans le champ de perception.
  3. L’attention les renforce : plus on y pense, plus ils prennent de place, créant un cercle vicieux.


Résultat ? Un phénomène qui était au départ anodin devient incontrôlable et omniprésent.




Le rôle du stress et de l’anxiété dans cette amplification


L’hypervigilance est souvent liée à des périodes de stress, d’anxiété ou de fatigue nerveuse.


  • Un événement angoissant (maladie, perte de contrôle, peur du décollement de rétine) peut déclencher cette fixation excessive.
  • Les personnes perfectionnistes ou très attentives aux détails sont plus susceptibles de développer une hypervigilance sensorielle.
  • Le manque de sommeil et la fatigue oculaire aggravent la perception des corps flottants.


Une étude sur les troubles sensoriels a montré que les personnes anxieuses ont 30 % plus de chances de souffrir d’acouphènes persistants. Il en va de même pour les corps flottants : l’état mental joue un rôle clé dans leur intensité perçue.




stress et hypervigilance

Comment casser le cercle vicieux de l’hypervigilance visuelle ?



  • Arrêter de tester ses corps flottants : plus on cherche à les voir, plus ils deviennent perceptibles.
  • Réapprendre à détourner l’attention : focaliser son regard sur autre chose, comme un objet précis ou un texte.
  • Travailler sur le stress et la relaxation : la méditation, la respiration profonde ou les techniques de pleine conscience aident à apaiser le cerveau.
  • Modifier son rapport aux flottants : comprendre qu’ils ne sont pas un danger et qu’ils peuvent être mis en arrière-plan par le cerveau avec le temps.


Conclusion : le cerveau peut désapprendre à voir les corps flottants


Les corps flottants ne sont pas toujours le problème en soi : c’est l’importance que le cerveau leur donne qui les rend insupportables. L’hypervigilance transforme un phénomène bénin en une obsession. Mais la bonne nouvelle, c’est que ce même cerveau qui amplifie peut aussi apprendre à filtrer et à ignorer. Avec le bon entraînement et une approche adaptée, il est possible de retrouver une perception plus naturelle et sereine.


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Oui. Le stress et l’anxiété augmentent la perception des corps flottants en perturbant le filtrage sensoriel du cerveau. En état d’hypervigilance, le cerveau focalise davantage sur ces stimuli visuels, renforçant leur présence. De plus, le stress active le système nerveux sympathique, entraînant une dilatation des pupilles et une fatigue oculaire qui accentuent leur visibilité. La boucle anxiogène crée un conditionnement négatif : plus on y pense, plus ils semblent envahissants. Réduire le stress, pratiquer la relaxation et détourner l’attention sont des stratégies clés pour atténuer cette perception.
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